Merci pour cette opportunité de pouvoir être enfin entendue.
Il est vrai que pour moi il y a une accumulation de traumatismes. Puisque ma mère était maltraitante. Elle a commencé lorsque j’avais 1 an1/2.
Mon père a eu des gestes incestueux lorsque j’avais 4 ans 1/2. Nous l’avions rejoint dans le pays où il faisait le « maintien de l’ordre » car il n’y avait pas de danger parait-il. Là, j’étais tellement en manque d’affection que j’aimais être sur ses genoux et m’endormir dans ses bras lorsque toute la famille était réunie à la cuisine. Mon frère et ma soeur plus grands allaient se coucher bien avant, puis mon père m’amenait dans la chambre et me mettait en pyjama. Il en profitait pour caresser tout mon corps. Une fois, je me suis réveillée, et mon père m’a punie. Il était donc mal de se réveiller lorsqu’il me caressait le corps ! Par la suite je ne suis plus allée sur ses genoux, il me faisait peur.
Lorsque j’ai eu 7 ans, ce sont des violeurs du pays où nous étions qui se sont attaqués à moi. Le bruit avait couru et mes parents ont cru bien faire de ne mettre à l’abri que ma sœur qui était pubère. Moi je ne l’étais pas. Leur souci c’était l’enfant qui pouvait venir d’un tel acte, et mon père me l’a confirmé lorsque j’ai retrouvé mes souvenirs à l’âge adulte, car il m’a dit : « pourquoi revenir sur un viol, si viol il y a eu, puisqu’il n’y a pas eu de maladie vénérienne ». Il disait aussi : « une femme ne se fait pas violer si elle ne le veut pas ». Dans la mesure où je lui parlais d’enfant et qu’il me répond « femme », je me pose des questions et pense que cet accident de parcours lorsque j’avais 4ans 1/2 n’était pas un accident de parcours. Cette phrase aurait pu me détruire,mais j’avais déjà retrouvé pas mal d’images de ce double viol et je ne pouvais plus douter. Merci psychothérapie.
Lorsque j’ai eu 9 ans, mon grand-père paternel qui venait d’être mis à la porte de chez un de ses fils qui l’hébergeait contre une petite pension, car il avait fait des attouchements sur ma cousine, a été hébergé par mes parents, qui étaient donc au courant de sa pédophilie.
Etant la plus fragile, il m’a attiré à lui avec des cadeaux, des habits, de la menue monnaie. Un jour, je devais avoir 10 ans, j’ai eu la force de lui dire NON, je n’aime pas. Lui, il est mort alors que j’avais 12 ans. Au cimetière un groupe de francs-maçons est venu lui rendre les honneurs car il était un des leurs. Honte sur eux qui ont hébergé en leur sein un pédophile et sont venus lui rendre les honneurs. Je ne sais pas pourquoi, mais je pense que cette pédophilie n’était un secret pour personne.
Ma famille voulant que je revienne sur mes paroles car je commençait à l’ouvrir, c’était dans les années 1997, et cherchant même à m’interner car soi-disant j’aurais menacé ma mère de mort … (pourquoi donc uniquement ma mère ? mystère, ils ne me l’ont pas dit) j’ai quitté la région sur le conseil amical du médecin qui m’a reçue sans m’interner.
Ouf, j’ai eu chaud ! Merci Toubib ! J’ai donc coupé les ponts avec ma famille pour ma sécurité. Je vis en exil dans un autre département, loin de mon département d’origine.
A 22 ans, donc en 1974, je me suis mariée et j’ai eu un enfant. Divorce lorsqu’il a eu 4 ans. Et depuis je vis seule. Je me sens incapable de refaire ma vie, malgré ma psychothérapie. Et pourtant, vivant avec 800 euros de ressources, j’aimerais bien pouvoir vivre en sécurité avec un compagnon pour pouvoir mettre en commun nos revenus.
Lorsque je vois un homme qui ressemble par certains traits à ce grand-père, et là je pense à un homme politique, j’ai envie de vomir et je zappe. Impossible de rester devant la TV. Lorsqu’une personne a la même forme de doigt, pouce qui fait un angle avec le reste de la main, je ne sais pas comment décrire, je suis écœurée et quitte les lieux.
Impossible pour moi de communiquer avec cette personne que j’assimile à ce grand-père.
J’ai maintenant la soixantaine. Toujours choquée par mon vécu. Vous me direz qu’il est assez compliqué et que mes souffrances ne sont pas limitée à l’inceste, mais qu’on ne vienne pas me dire que les enfants victimes d’inceste s’en sortent bien et que pour les autres, c’est de la fantasmagorie. Je déforme les propos de ce Monsieur Rufo ? Oh très peu.
Et lorsqu’on parle un public dont certains ont vécu des choses difficiles, on fait attention aux mots qu’on prononce.
Je n’ai pas porté plainte, ni pour le viol ni pour les incestes car la prescription était passée par là. Et puis, les procès de viol ou d’incestes montrent encore tellement de laxisme envers les responsables.
Pauvres victimes. Il faudra se faire justice nous-même si la justice ne sait pas ouvrir ses oreilles et si des Monsieurs Rufo disant n’importe quoi les aident.
Oui, je suis en colère.
- Référence à l’émission allo Rufo France 5 03.12.12 « La majorité des enfants abusés vont bien »