Tous les prénoms ont été changés afin de respecter l’anonymat de chacun(e)
Emilie : Moi, c’est Emilie, survivante de l’inceste, j’ai été agressée de 5 à 12 ans par mon oncle maternel. J’ai bientôt 36 ans et maman de 2 garçons qui ont 10 et 15 ans.
Marie : Marie, survivante de l’inceste, ça a commencé j’étais toute petite, c’était un membre de la famille que j’ai découvert il n’y a pas longtemps et après, par un frère qui a abusé de moi, j’avais 8 ans jusqu’à ce que je parte de chez mes parents, j’avais 19 ans, il était papa d’ailleurs, je m’en souviens. Aujourd’hui, je suis mariée, j’ai 3 garçons et voilà…
Nadia : Bonjour, je m’appelle Nadia, je suis survivante de l’inceste, j’ai été agressée par mon père j’avais moins de 6 ans, je n’ai pas tous les souvenirs mais j’en ai suffisamment pour être ici aujourd’hui et je suis mariée mais probablement en instance de divorce prochainement et j’ai un fils de 21 ans.
Iris : Iris, survivante de l’inceste, je suis mère de 2 filles qui ont 25 et 20 ans. J’ai été agressée par mon beau-père avec l’aide de sa copine et de ma sœur, de 13/14 ans jusqu’à je ne sais pas quel âge, je n’ai pas encore tous les souvenirs en retour.
Sofia : Sofia, j’ai été agressée par mon 3ème frère, j’avais 7 ans et ensuite, le second de mes frères qui avait 22 ans a voulu m’agresser lorsque j’avais 15 ans mais là, je m’en suis sortie. Je suis mariée, j’ai 54 ans et j’ai une fille de 24 ans.
Sarah : Bonjour, Sarah, j’ai 57 ans, je suis survivante d’inceste de l’âge de 9 ans à 17/18 ans et de pédocriminalité a peu près dans les mêmes âges aussi, aux alentours de 9 à 13 ans. J’ai été mariée 3 fois, divorcée 3 fois, je n’ai pas d’enfant et je suis bénévole au sein de l’association depuis sa création et j’espère bien continuer longtemps.
Sofia : Moi, je veux bien commencer, même si c’est très difficile… En fait, le thème m’interpelle dans la mesure où… lorsque je me suis mariée, je me suis mariée en 1982, ma fille je l’ai eue en 1986, en 1988 j’ai voulu parler de ce que j’avais subi à mon mari et mon mari m’a jetée, il n’a pas attendu que je lui parle de quoi que ce soi, il m’a jetée, il m’a tourné le dos. Il m’a fallu des années pour comprendre que les difficultés que j’avais étaient liées à ce que j’avais vécu quand j’avais 7 ans, il m’a fallu des années, je n’avais pas fait le lien. La vie sexuelle… voilà ! Ce n’est pas terrible. J’ai une très forte indépendance aussi quelque part parce que je viens d’une famille masculine, j’ai 4 frères et je n’ai que mon père qui m’a soutenue mais sans que je ne puisse lui dire quoi que ce soit… jusqu’à l’âge de 40 ans, j’ignorais que c’était lié à « ça » et j’ai galéré comme toutes ici, c’est l’horreur.
Sarah : La vie en couple je l’ai effectivement tentée 3 fois de manière légale. Je pense que encore aujourd’hui j’investis trop dans le partenaire, je dépend trop, trop, trop de lui, je ne peux pas faire autrement et c’est vital pour moi de dépendre de lui. C’est vrai que mes époux légitimes ne correspondaient pas du tout à ce que je pouvais attendre. Mon ami actuel semble vraiment être au cœur de l’action, il m’a toujours soutenue, c’est le premier qui m’a vraiment écoutée sans me juger, au contraire, en essayant de comprendre, à la fois de m’aider, et il continue bien qu’il soit complètement… pour lui, il est arrivé au terme de ce qu’il pouvait faire pour moi. Il me soutien dans mes démarches au niveau de l’association. Au niveau de la vie de couple, c’est vrai que je suis aussi partagée parce que j’ai eu un début de vie plus que difficile puisque j’ai été enlevée à mes parents légitimes, je suis une enfant de la DASS, quelle est la part de responsabilité de ce début d’enfance et « ça » ? La responsabilité de l’état d’enfant/adolescent assisté par rapport à l’inceste aussi, c’est un peu la guerre dans mon cerveau, ça l’est toujours malgré mes 57 ans, ce qui fait que la vie en couple c’est particulièrement difficile parce que je ne sais même pas qui je suis moi, ce que je veux, j’ai tellement besoin d’amour et de donner de l’amour, j’en arrive à étouffer mes partenaires, les partenaires que j’ai eu et même mon ami maintenant, il est arrivé à mettre de la distance dans tout ça et à me prouver que j’étais capable d’aimer et d’être aimée sans être obligé de le démontrer. Ça entraîne chez moi un certain nombre de problèmes, ce qui fait que même la vie quotidienne… je suis seule, je me rend compte que je suis littéralement toute seule, si lui n’est pas là, je suis seule, j’ai l’impression que je fait fuir les gens… pourtant je pense que je suis quand même relativement « facile » au niveau discussion, je pense pas que je sois complètement con, je ne suis pas complètement bornée, j’ai un certain nombre de connaissances, je suis avide de connaissances aussi, quelque part je suis un peu comme tout le monde… mais seule. Quant à la vie sexuelle alors là n’en parlons pas ! Le sexe pour moi, s’il n’existait pas, s’il n’avait jamais existé ça aurait été parfait. Actuellement, je suis tranquille parce que je n’ai plus de vie sexuelle et ça ne me manque absolument pas, au contraire, je vis la relation d’amour pur, je vis un peu d’amour et d’eau fraîche comme on dit. Dès l’instant que je n’ai pas à me sacrifier au niveau sexuel, je vais bien. Je pense que l’inceste et le début de ma vie d’enfant ont bien contribué à me mettre un peu à l’écart de la société tout en voulant y appartenir.
Iris : Difficultés dans la construction du couple oui ! J’ai eu du mal à construire un couple parce que j’étais tellement remplie d’angoisse et de peur. Lors de mon premier mariage j’avais des crises d’angoisse en permanence, la moindre chose, il suffisait que je ne voie plus mon mari j’étais en panique totale, c’était l’horreur et il m’a supportée pendant un certain nombre d’années, pendant 15 ans et je crois que mon premier mariage a été complètement pourri par la peur qui était liée à l’inceste mais je ne savais pas à l’époque. Je suis sortie du déni en 2003 ou 2004 alors j’ai entamé une thérapie avec un psychiatre, j’ai retrouvé les souvenirs à ce moment là et peu de temps après mon premier mari est parti, je suis restée seule avec deux enfants et vivre seule n’est pas facile pour moi non plus donc je me suis mise en couple même si je le vivais mal. Là, je suis remariée depuis 3 ans mais la vie de tous les jours n’est pas facile. Quand on se retrouve que le soir ça va mais quand on est le week-end ensemble j’ai envie de me replier sur moi-même et de me réfugier dans mon lit, rester tranquille et dormir et fumer cigarette sur cigarette mais mon mari est le contraire de moi et on a du mal à accorder nos violons, nos énergies. Mon psychiatre me dit que j’arrive en fin de thérapie, que je vais beaucoup mieux, que je suis complètement détendue, j’ai encore des angoisses et je ne sais pas encore combien de temps ça va durer… pour le moment quand je regarde le calendrier et que je vois tel week-end qui est pris par telle activité je suis contente parce que ça veut dire que je ne suis pas à passer ma journée en tête à tête avec mon mari parce qu’un week-end entier c’est trop difficile, j’ai beaucoup de mal, j’ai beaucoup de mal à faire les choses à deux avec un homme. J’ai besoin d’un homme dans ma vie, j’ai besoin de lui mais un peu comme un petit toutou dont je peux me servir à ma guise quand j’ai besoin de lui. Je n’ai jamais eu d’ami dans ma vie… vie sexuelle, un désastre, un désastre, je ne supporte pas d’être touchée, j’ai du mal à supporter d’être touchée par un homme, en plus, j’ai des médicaments pour les crises d’angoisse qui font qu’il n’y a même pas de désir de mon côté. Mon mari subi tout ça sans trop protester mais parfois il me dit « trop c’est trop » mais il est patient.
Marie : J’ai eu une vie de couple heureuse tout le temps où j’ai été dans le déni de mon histoire, j’ai vécu 20 ans, je ne peux pas dire de bonheur mais… comme je n’étais pas dans mon histoire je n’étais peut-être pas dans quelque chose de bien parce que je pense que je fuyais aussi cette histoire puisque je n’étais pas stable au niveau emploi, je changeais d’emploi tous les 3 ou 4 ans, quand c’était la routine il fallait que je pense à autre chose, je fonctionnais comme ça. A la maison, je faisais énormément de choses c’est pour ça qu’un jour ça a dit « stop là ! » mon histoire m’est revenue en pleine figure et c’est là où j’ai dégringolé. C’est vrai qu’il y a une incidence sur ma vie de couple, mon mari n’a pas trop bien compris ce qui s’est passé, il n’a pas compris la mesure de ma souffrance, il a entendu ce que je lui ai dit mais… il a du se dire « c’est bon maintenant on sait pourquoi… » parce que j’avais fait des mini-dépressions il y a quelques années et il m’a dit « c’est bon, maintenant on sait ce que c’est. » Même si on a eu des difficultés au début de ma dépression jusqu’à il n’y a pas si longtemps où moi-même je me disais « je crois que je vais m’en aller parce que c’est trop dur de vivre avec un mari qui ne comprend pas » mais je ne lui parlais pas non plus de ce que je vivais, il n’était pas forcément au courant que j’avais mal, donc j’étais agressive avec lui, c’est vrai qu’il en a un peu souffert aussi. J’ai quand même de la chance parce qu’il m’a gardée malgré tout parce qu’il aurait pu me rejeter, même moi si j’avais un moment donné envie de partir avec les enfants il m’a quand même gardée, donc, quelque part, ça va. On vit plutôt l’un à côté de l’autre mais je commence à être un peu plus à l’aise avec mon histoire et lui. Parce que c’est tabou mais je l’ai amené ici la semaine dernière, il a vu les personnes de l’association, aujourd’hui, il n’est pas venu mais il n’en était pas loin, il est en chemin un peu pour s’ouvrir à ce qui se passe pour moi. J’ai appris aussi à faire autrement avec lui parce que concernant la vie financière on n’avait pas de compte commun jusqu’à il n’y a pas si longtemps que ça et c’est ma psy qui m’a aidée à ça parce que j’ai été un moment sans travail et j’ai une petite retraite de fonctionnaire mais je faisais les courses et à la fin du mois je lui disais toujours « aller, tu mets de l’argent sur mon compte parce que je n’en ai plus » et puis, un jour, je lui ai dit « stop là ! Il faut qu’on est un compte commun parce que moi j’en ai marre de galérer comme ça.» Parfois, je comptais, je me disais « je vais l’envoyer lui faire les courses » et je lui faisais remplit un caddy pour avoir moins de dépense à faire mais ça s’est arrêté parce que je me suis affirmée là-dedans, je lui ai dit « mais ce n’est pas normal », mais il ne se rendait pas compte, même s’il avait tendance à dire que les femmes sont dépensières, je lui ai montré que je ne l’étais pas. La vie sexuelle, il n’y en a pas et tout ce qui est relationnel en ce moment ça se complique parce que j’ai fait un tri dans mes amis quand j’ai déprimé et là, j’en refais un autre parce que je commence à me dire « non, c’est bon, elle, je vais m’en passer parce qu’elle profite aussi de moi », ça commence à devenir clair même si c’est dur à faire et même si je m’en suis pris plein la tronche cette semaine avec l’un de mes enfants qui m’a reproché de n’inviter personne à la maison et où je lui ai dit « j’en ai marre d’inviter des gens qui profitent, qui viennent avec 2 gâteaux pour 5 et qui reviennent de Kaboul ou de je ne sais pas où avec une prime de militaire et qui font croire qu’ils n’ont rien pour vivre »
Nadia : J’en suis déjà à mon 2ème mariage, j’ai déjà divorcé une fois, j’ai donc été quittée une fois par mon premier mari. Au départ, je ne savais pas du tout que j’avais été abusée, j’avais des petits soupçons mais ce n’était pas possible de voir en face les choses, je me disais « mais ce n’est pas grave, c’est rien par rapport au monde, il y a tellement de choses difficiles dans le monde qui se passe, ce n’est rien… » Mon deuxième mari, avec qui je suis déjà depuis 18 ans, même si je ne vis plus avec lui depuis 3 ans, j’ai épousé un homme qui probablement, lui aussi, a été victime d’inceste, donc, j’ai vécu une énorme confusion avec lui, j’ai vécu au départ de notre vie sexuelle la violence et la maltraitance sexuelle et après, des années d’infidélité et après, une impossibilité à se rencontrer à ce niveau là de toute façon malgré tout ce que j’ai essayé de mettre en place depuis 10 ans. J’ai vécu une énorme confusion parce que celui qui m’agressait c’était l’homme que j’aimais, j’ai mit énormément de temps à voir que c’était une agression, énormément de temps, j’ai 52 ans là, c’est seulement maintenant que je me dis « ça c’est bien une agression. » J’étais obligée de demander l’avis « est-ce que ça c’est normal, c’est pas normal ? », à part au niveau sexuel, ça a été un espèce de cauchemar dans toutes ces formes que ce soit l’agression, le non-couple, la non-communication, il ne voulait pas, les infidélités et je l’aimais quand même, c’était vraiment… je suis tombée malade, j’ai eu un problème de thyroïde que j’ai toujours depuis 12 ans et pour moi c’est certainement lié à la vie sexuelle que j’ai eu avec cet homme, ça a eu une influence évidemment sur mon couple. Au niveau de la construction… j’ai choisi un homme qui ne peut pas construire, qui ne peut pas supporter lui aussi l’intimité et moi j’en souffre, je ne peux pas rester comme ça, je me sens maintenant très abîmée dans ce domaine là mais je n’ai pas fini ma vie, j’ai l’intention de rencontré quelque chose de plus beau, de plus normal, de plus léger. Ce qui a été très dur pour moi c’est la vie professionnelle, ça a été extrêmement difficile, j’ai ramé, j’ai repris mes études à 40 ans pour changer de métier, je fais un métier que j’aime mais qui est extrêmement difficile, très dur, beaucoup de violence et moi j’ai énormément de mal à m’affirmer, j’ai peur du conflit, je ne sais pas m’affirmer, je suis encore paralysée comme si… je n’ai véritablement évolué à ce niveau là.
Émilie : Dans mon couple, je suis perdue. Parfois, j’en suis contente et quand j’en suis contente tout à coup je suis déçue par le comportement de mon ami. J’ai déjà divorcé une fois parce que j’étais avec un homme qui était violent, je suis assez fière de moi de m’en être débarrassé parce que je me dis que je n’ai pas reproduit le même schéma que ma mère. Je me souviens bien ce que c’était que d’avoir un père violent et sa mère se voir frappée, je suis contente que mes enfants n’aient pas à subir ça. Mon premier vrai petit ami avec qui je suis restée 3 ans était déjà violent plus après celui qui est devenu mon mari et celui avec qui je suis maintenant depuis un bout de temps il est très doux comme un agneau, parfois trop, c’est limite passif, parfois, j’ai envie de le secouer pour qu’il réagisse. J’ai du mal à m’entendre avec sa famille, ses sœurs parfois me balancent des saloperies en pleine tête c’est moi qui suis obligée de me défendre parce que lui ne va jamais intervenir, ça, ça m’énerve, ça me déçoit, il est un peu fuyard donc il va être tenté de faire des petits mensonges pour ne pas que je m’énerve et c’est vrai qu’après avoir eu une vie de couple un peu tumultueuse je suis devenue assez intransigeante, je ne pardonne pas vraiment la trahison, le mensonge, je suis assez dure là-dessus. Il a quand même beaucoup de qualités, c’est vrai qu’il me soutien beaucoup au quotidien, il s’occupe très bien de mes enfants, après est ce que c’est suffisant ? Je n’en suis pas sûre… je n’arrive pas à me projeter, même si ça fait longtemps qu’on est ensemble, je n’arrive pas à faire des projets avec lui. Je n’ai pas envie de me remarier. Vie sexuelle… c’est compliqué aussi. Je suis plutôt dépendante sexuelle, j’ai fréquenté les groupes des dépendants sexuels anonymes, c’est un problème que j’ai depuis l’adolescence, ce qui fait que je n’ai jamais réussi à rester fidèle sauf depuis que je m’occupe de ce problème en thérapie, j’ai réussi à stopper ces comportements à risque mais j’ai un ami qui lui n’est pas du tout demandeur au niveau de la sexualité, il s’en passe bien, du coup, ça me met dans une position un peu compliquée, je me vois tout le temps en demande et lui « ouais pourquoi pas… » mais je crois qu’il se passerait bien de la sexualité en fait, ce n’est pas hyper clair, les rôles sont un peu inversés, c’est moi qui est obligée de stimuler tout le temps notre couple à ce niveau là, sachant que je suis dépendante sexuelle et que c’est comme toute dépendance, je suis obligée d’être vigilante et de ne pas me laisser aller parce que sinon très vite je pourrais aller voir ailleurs, comme je n’ai pas envie de détruire mon couple, je ne le fait pas mais c’est compliqué. Dans notre vie relationnelle, j’ai besoin de tout contrôler, de décider de tout, on n’a pas de compte commun parce qu’avant j’avais un compte commun avec mon ex mari et il m’a laissée sur la paille donc, maintenant un compte commun ce n’est même pas la peine, je ne fait pas confiance.
Sarah : Dans la vie relationnelle, moi, j’ai un gros souci, j’ai toujours eu ce souci là, je n’ai confiance qu’en l’homme, je n’ai pas confiance en la femme alors que j’ai été agressée par un homme. Ça vient peut-être du fait que je n’ai aucun souvenir et aucun signe de ma propre mère de laquelle je suis toujours en recherche et que je n’aurais jamais rien puisqu’elle est décédée et je n’ai absolument rien sur elle et je pensais trouver des choses dans mon dossier administratif et il n’y a rien du tout. Je vis vraiment très mal la relation avec une femme. Est-ce que cette relation je la vis mal et que je la retranscris et que les gens la ressente ? Je ne sais pas. J’essaie d’être sympa mais c’est vrai que j’ai vraiment du mal à faire confiance à une femme alors que je n’ai pas du tout de mal à faire confiance à un homme, même trop d’ailleurs. J’ai eu un écueil il y a 4 ans de ça dans une relation bien particulière, on était partis sur une relation à 3, avec des choses bien précises au sein du couple, c’était un peu hors norme par rapport à ce que vivent d’autres personnes mais on s’en accommodait et j’étais entrée dans cette relation avec cette femme. J’avais une relation avec cette femme comme une relation de 2 sœurs, je savais pertinemment qu’on n’avait aucun lien de sang mais moi je vivais cette relation très fortement parce qu’il y avait le lien entre mon ami et c’est vrai qu’elle m’a trahie d’une façon épouvantable en m’impliquant directement… en me mettant en cause directement, en mettant en cause mon intégrité personnelle allant jusqu’à dire que je ne me lavais pas, des trucs qui étaient très, très fort, ce qui fait que j’ai cette appréhension envers les femmes et à côté de ça je recherche le contact avec les femmes de valeur qui ont quelque chose dans le pantalon, est ce que c’est mal vécu ? Je ne sais pas.
Sofia : Je suis bavarde aujourd’hui ! Pour en revenir à la vie relationnelle, elle a toujours été plus importante que ma vie familiale, la famille au sens large, que je sois célibataire ou que je sois mariée. C’est vrai que j’ai fait beaucoup de tri, j’ai du faire beaucoup de tri et en plus je suis partie en province donc j’ai perdu aussi pas mal de gens parce qu’à partir du moment où on est loin les gens n’ont pas envie de téléphoner, ils n’ont pas envie de faire d’effort, d’écrire… mais c’est vrai que depuis une trentaine d’années j’ai toujours les mêmes personnes autour de moi dans mes amis, ça c’est clair et mes amis ont toujours su plus ou moins ce que j’avais vécu, je dis bien plus ou moins ! Que ma famille, il n’y avait que mon père a qui j’aurais pu en parler, je n’ai jamais pu lui en parler parce que j’avais trop honte, ma mère m’a maltraitée quand j’étais bébé. Même si j’étais réservée, je me suis forcée, j’ai pu construire des relations qui ont duré sur le long terme parce que je suis très attachée aux relations à long terme, je vais être difficile dans les relations, c’est vrai.
Marie : J’ai un mari qui est quand même assez doux, je ne pense pas que j’aurai fait une vie de couple avec quelqu’un qui aurait dirigé ma vie parce que c’est plutôt moi à la maison qui prend des initiatives et qui veut que ça marche comme ça et il marche comme ça. Ceci dit si j’étais sortie du déni avant, je crois que je ne serais pas en couple du tout parce que je vois ma difficulté avec les hommes, ne serait-ce que dans le relationnel, j’ai du mal à parler ou je suis toujours mal à l’aise quand il y a un homme même si c’est mon voisin ou quelqu’un d’autre, je ne sais pas comment les prendre, j’ai comme l’impression que j’en ai peur et que je ne sais pas quoi leur dire. Ça m’était difficile il n’y a pas longtemps parce que j’ai fait venir des gens pour faire des travaux à la maison et je me suis arrangée pour que mon mari soit là et que je ne sois pas toute seule avec ces gens là mais je m’en rend compte maintenant, je me rend compte que c’est lié à ce que j’ai vécu parce qu’il y a plusieurs personnes qui m’ont agressée et c’est ce qui fait que je ne suis pas à l’aise avec les hommes.
Nadia : Moi, c’est un faux couple, mon compagnon a tout fait pour qu’il n’y ai pas de couple, malgré tout il y a eu des sentiments aussi et moi de mon côté c’est pareil, c’est à la fois de vrais sentiments et à la fois de la vraie maltraitance. Je voulais parler de la confusion aussi. Je pense que l’inceste a apporté dans ma tête, dans mes sentiments et dans mon corps surtout beaucoup de confusion. Reprendre des repères tout doucement ce n’est pas facile, moi aussi j’ai peur des hommes, moi les hommes… faire des travaux chez moi… je ne peux pas faire de travaux, je ne veux pas qu’ils viennent chez moi mais je me rend compte que j’ai besoin de me re-confronter au monde masculin parce que d’abord j’en ai envie, je suis une femme et j’ai besoin de la dimension masculine. J’ai comme projet de rencontrer des hommes pour voir comment on peut avoir des relations juste pour parler déjà pour le moment, pour avoir une autre approche du monde des hommes parce que j’ai une grande lacune là.
Émilie : La confusion ça me parle bien. Comme je disais tout à l’heure mon premier petit ami avec qui c’était sérieux, je l’ai rencontré au lycée, quand j’avais 15 ans, il me paraissait très gentil sur le coup et il s’est avéré que c’était un garçon violent et les premières relations sexuelles que nous avons vécu ensemble, il m’a violée, je suis tombée enceinte, j’ai du avorter, ce qui n’a pas simplifié les choses et en même temps c’était très confus parce que finalement qu’est ce que j’avais comme repères autour de moi ? J’avais mon père qui était violent avec ma mère et qui buvait, j’avais mon oncle qui était incestueux, beaucoup de violences dans la famille et j’avais du mal à comprendre que ce que je vivais avec ce petit ami ce n’était pas normal non plus et que c’était de la violence. C’est vraiment des années après que je me suis rendue compte qu’il ne m’aimait pas, ce n’était pas de l’amour, je suis restée un certain temps avec lui, j’étais sous son emprise, à chaque fois il revenait en pleurant avec plein de cadeaux et moi je cédais. Ensuite, je me suis sauvée de la maison vers 17 ans, je suis partie dans la rue et c’est un autre ancien petit ami qui m’a récupérée et avec qui je me suis mariée parce que j’ai cru que c’était ma bouée de sauvetage et idem, c’était un homme violent. A l’époque je ne le savais pas, je n’arrivais pas à déceler et comprendre ce qu’était la violence, je pense que pour moi c’était peut-être normal et peut-être que je méritais ça mais le déclic s’est fait quand il a levé la main sur l’un de nos fils, là, pour moi c’était pas possible, c’est là que je me suis vraiment rebiffée et que je l’ai quitté mais je ne suis pas sûre que s’il avait levé la main que sur moi… je ne sais pas si j’aurai réagi vraiment, je réagissais oui parce que je me rebellais verbalement. En fait, je faisais comme avec mon père, comme je savais que j’allais m’en prendre une de toute façon je provoquais verbalement, je reproduisais un peu la même violence et je ne me rendais pas vraiment compte. Du coup, maintenant, faire confiance au quotidien dans le couple c’est compliqué, j’ai toujours l’impression qu’il va m’arriver une bricole. Je ne supporte pas de perdre le contrôle dans mon couple, je ne supporte pas qu’il y ai un mot plus haut que l’autre, qu’on me parle mal, qu’on prenne une décision à ma place. Moi qui étais très dépendante avant je trouve des hommes et de mes conjoints, je suis maintenant très indépendante et je sais que mon conjoint a du mal à le vivre parce que je sors le soir, je ne fais rien de mal, je ne vais pas le tromper, mon addiction sexuelle j’ai beaucoup travaillé dessus en thérapie, je n’ai plus du tout envie d’aller vers cette vie là, je vais sortir avec des copines, avec des amis parce que j’en ai besoin. Mais aujourd’hui que je me connais et que j’ai davantage confiance en moi et que j’accepte plus facilement d’aller vers les autres, j’ai besoin de faire des choses seule et sans être à deux.
Sarah : Je pense que je n’ai rien mis en place dans mon couple pour surmonter les difficultés. Le souci c’est que j’ai le recul maintenant pour dire ce qui n’allait pas dans mes couples précédents, pourquoi ça n’allait pas. Il s’avère que dans le couple actuel que je forme avec mon ami, qui lui est en couple légitime à côté, donc c’est un peu bâtard, je ne peux pas dire que je suis en couple vraiment avec lui mais c’est vrai que la parole, l’expression du traumatisme, la recherche du pourquoi, la déculpabilisation m’a permis d’avancer et j’ai l’impression que maintenant face à cet assassinat que j’ai subi, j’ai la tête haute, j’ai une certaine fierté de celle que je suis devenue malgré les écueils. Je ne dirais pas que j’ai un regret de ce que j’aurai pu être parce qu’on peut tous dire « si j’avais su j’aurai pas venu » ou autre… mais je pense que malgré tout entre ma vie d’origine, mon absence de parents, l’inceste, puis ma vie d’enfant victime, je m’en suis bien sortie, quelque part, j’estime que je peux être fière de moi et ma grande fierté aujourd’hui c’est de pouvoir parler de ce problème là, même si c’est très douloureux, si ça m’arrache encore un bon nombre de litres de larmes, j’ai l’impression que, malgré que je sois très large au niveau physique, mon petit être aura servi à l’humain. Ce que j’ai mis en place ce n’est pas dans mon couple mais c’est dans ma vie à moi, c’est que je suis ce que je suis, malgré les écueils, je suis devenue quelqu’un et on est jamais mieux servi que par soi même, par conséquent : je suis contente de moi.
Iris : Je n’ai rien mis en place non plus pour surmonter les difficultés parce que je ne sais pas quoi faire. Si c’était à refaire, je ne sais pas si je me serais remariée, je ne suis pas sûre que je me serais remise en couple tant que je n’aurais pas fini ma thérapie parce que je ne sais pas vraiment qui je suis, ni ce que je veux dans la vie et comme mes pensées sont obsédées par la peur et la colère, ça me prend trop de temps et je n’ai pas assez de temps pour vivre normalement et vivre sainement. C’est comme si dans ma vie d’adulte, les seules relations que je n’ai pu avoir avec des hommes c’est avec des étrangers, je n’ai jamais pu être en couple avec un norvégien, quelqu’un qui parlait ma langue et qui était de ma culture, ça m’était impossible. J’ai fui mon passé, j’ai fui mon pays, j’ai fui ma famille. Ce que j’aimerais refaire c’est que lorsque j’ai rencontré mon 2ème mari, sur la quarantaine, j’étais en âge encore d’avoir des enfants et je n’ai pas vu venir les 50 ans et c’est un grand chagrin pour moi parce que j’aurai aimé avoir un troisième enfant, surtout un enfant de mon mari actuel qui n’en a pas du tout, ça c’est un grand chagrin mais les années sont passées trop vite. J’en veux à mes agresseurs parce qu’ils ont volé ma vie et je n’ai pas pu vivre la vie que j’aurai dû vivre si les agressions n’avaient pas eu lieu. J’ai 50 ans passés, il faut que je me rattrape, j’essaie de me rattraper par rapport au passé mais ce n’est pas évident parce que je n’ai plus 25 ans, on n’a pas la même énergie, les mêmes possibilités que quand on est jeune, je suis en ce moment dans un cul de sac. Je continue ma thérapie, j’essaie de faire des progrès, j’essaie de parler le plus possible quand je viens au groupe pour pouvoir dire mon mal-être et mes échecs et j’attend de pouvoir sortir de ma dépression et de pouvoir vivre normalement, après je pourrais mettre en place des choses pour mon couple éventuellement s’il survit.
Sofia : Il m’a fallut beaucoup de temps pour comprendre que mes difficultés, qui venaient de moi et les difficultés de mon couple, étaient liées à mon passé. J’ai aussi fait de la dépression. Une fois que je me suis occupée de ma mère pendant un an, je l’accompagnais dans sa maladie, quelques années après, j’étais très, très mal, tout était remonté et je ne faisais plus face, je ne voyais plus le jour et là, j’ai décidé de m’occuper de moi, je ne sais pas si je me suis occupée de mon couple mais je me suis occupé de moi, donc, j’ai fait une thérapie et de ce jour ça a été beaucoup mieux, j’ai dit les choses tel que je les voulais, tel que je les faisais et il y a des choses qui ne sont pas passé, comme le fait que mon mari n’accepte pas que je souhaite parler de mon passé, il n’a pas accepté et il n’accepte pas mais c’est passé, maintenant j’ai vu un thérapeute, j’ai des amis avec lesquels j’ai pu en parler, donc, ça m’est égal. C’est vrai qu’une fois il m’a demandé, il m’a dit « qu’est ce que tu avais de si important à me dire ? » et je lui ai dit « non, je l’ai dit à des personnes auxquelles je tiens, je suis passée à autre chose. Si c’était à refaire, il est certain que je ne marierais pas, c’est fini, il est certain que je ne me marierais pas et si un jour je me retrouve seule, il est certain que je ne revivrais pas en couple, chacun chez soi mais pas en couple. C’est aussi le fait je pense que je viens d’une famille masculine et que je connais bien la mentalité masculine aussi, ça m’a bien éclairée.
Marie : Ce que j’ai mis en place c’est de me dire que je dois accepter mon mari comme il est, si on ne parle pas de moi, de mon histoire je l’accepte, après tout… je ne vais pas dire ça me regarde, ça le regarde quand même un peu aussi mais comment lui peut faire si je ne lui dit jamais ce que je ressens ? Et c’est ce qui se passe en fait, je ne lui dit jamais ce que je ressens et sur les discussions, sur n’importe quoi je vais être agressive et j’ai remarqué que je l’étais moins notamment sur cette semaine où il y avait un conflit qui aurait pu être et que je me suis dit « stop », je suis contente de moi, parce que c’est moi que je vois évoluer là. Je trouve que c’est important que j’accepte ça et je trouve que c’est plus fluide entre nous. On commence à reprendre un peu confiance l’un en l’autre, j’ai l’impression qu’on fait beaucoup plus de choses ensemble, des sorties ensemble, je lui parle davantage. Je crois qu’il change lui aussi avec le temps, il commence aussi à voir un peu plus clair. Si c’était à refaire, je lui dirais davantage ce qui ne va pas, avant quand je n’allais pas bien, je partais dans ma chambre et je pleurais et il ne pouvait pas forcément comprendre ce que je vivais, parce que j’ai eu des années où je me disais les week-end sont difficiles à passer parce qu’on ne parle pas de moi, parce que j’ai comme l’impression que je n’existe pas, je ne veux pas le bassiner avec mon histoire mais il y a des fois où j’aurais aimer lui dire « je ne vais pas bien, pourquoi c’est les dimanches et pas la semaine ». Là, j’occupe mon temps avec lui, j’ai mon programme, je vais marcher le matin, ça me va, mais je sais que les week-ends il y a un grand vide et je ne sais pas si c’est lié à la vie de couple ou si c’est que je vivais des choses difficiles étant enfant et que le week-end était pénible parce que je partais en pension la semaine et les week-end j’étais avec l’agresseur. Si c’était à refaire ? A part dire davantage qui je suis, pourquoi ça ne va pas… je suis aussi aidée par une thérapeute, je vois aussi les choses différemment. Si c’était à refaire avant ma sortie du déni, je ne crois pas que je serais en couple et que j’aurais des enfants. Aujourd’hui, les enfants me tiennent, ils sont là, il y a des fois où ça m’agace parce que j’ai envie d’être toute seule, ne pas faire à manger et puis c’est souvent en semaine où ils me disent « on ne mange pas là maman », le repas est prévu pour 5 et quand c’est le samedi soir je me dis « ça serait bien s’ils allaient se manger un grec et que moi je n’ai pas à faire à manger » et puis, ils sont tous là, c’est pas grave, en même temps, ils sont gentils.
Nadia : Je vais parler de mon 2ème mariage, au début je subissais les choses et je ne comprenais pas, j’étais assez violente dans mes réactions, dans mes propos, verbalement j’étais violente, hystérique parce que ça me rendait hors de moi. Et un jour, j’ai eu un indice de son infidélité, ça m’est venu vraiment sous le nez comme ça, il n’a pas nié donc ça m’a soulagée enfin… ce jour là je suis morte, l’infidélité, comme ça, quand on ne s’y attend pas… ça a été très dur pour moi, mais au moins je l’ai remercié parce qu’il n’a pas nié et à ce moment là j’ai pu commencer aussi, et même avant… j’avais déjà un peu commencé à aller dans les groupes sur les dépendances affectives et sexuelles pour pouvoir comprendre mon couple, ça a commencé comme ça, ça a été un choc pour moi ces réunions et pendant un an, je n’ai pas pu parler du tout et j’étais très admirative des gens qui étaient là parce qu’ils arrivaient à parler d’eux et de leur sexualité, moi pendant un an je n’ai pas pu et je me souviens d’avoir été applaudie quand j’ai pu enfin dire un mot, donc, ça, ça a commencé à m’aider, ce que je voulais aussi c’est parler, communiquer avec mon mari. Ensuite, j’ai continué de plus belle, j’ai changé de groupe puisque je suis allée dans un groupe sur l’inceste, c’est assez récent, ça m’a fait progresser sur moi et j’ai énormément lu sur la perversion, les rapports pervers, les manipulations, le profil de la victime, le profil de l’agresseur et ça m’a énormément aidée au point que je lis ça tous les jours, tous les matins parce que sinon j’oublie. Ça me tient un jour et… je me suis rendue compte que je n’existais pas, je n’avais pas d’identité, j’ai vécu ma vie très anesthésiée et j’avais besoin à chaque fois de me souvenir de l’agression pour pouvoir me dire « ah oui, j’ai vécu ça donc j’existe ! » et pour vivre, avant j’étais dans le déni et je ne vivais pas. Alors là, je ne suis plus dans le déni, c’est difficile mais c’est beaucoup mieux, c’est beaucoup mieux pour moi, ce n’est pas comparable. Par rapport à mon couple, qui dit couple dit 2 et là ce n’était pas 2, c’était 1, d’ailleurs j’ai entendu ici les réactions des conjoints par rapport à l’inceste, moi, ça ne l’intéresse pas, on ne peut pas… ça ne l’a pas intéressé, je ne l’ai jamais questionné mais je pense que lui à 99% il a eu la même chose. Je ne sais pas ce que je devrais refaire si je pouvais. Je me dis juste c’était mon chemin, ce que j’ai vécu c’était mon chemin, ça n’a pas été facile mais d’un autre côté, j’ai entendu une personne dire qu’elle était fière d’elle et je trouve ça merveilleux… si je me souviens de l’agression, si je me souviens de l’inceste, de la maltraitance, etc. j’ai eu beaucoup de courage dans la vie, mais si j’oublie ça, je me culpabilise, j’ai envie de vivre.
Émilie : Au début de ma relation avec mon nouvel ami, c’était très fusionnel parce que comme je l’ai dit je n’avais pas l’habitude de fréquenter des hommes doux et attentifs, c’est vrai qu’on était tout le temps ensemble, j’avais tendance à ne pas être bien dès qu’il n’était pas là, c’est vraiment la période où moi je sortais du déni en plus quand je l’ai rencontré donc tout ça emmêlé c’était assez compliqué, je lui ai parlé tout de suite de l’inceste, comme je l’ai fait à chaque fois avec tous mes compagnons, il m’a écoutée mais je crois qu’il n’a pas compris l’ampleur du problème. 8 ans après, il comprend parfaitement ! D’ailleurs il me le dit souvent « au départ, je n’avais pas compris à quel point c’était grave et les conséquences » maintenant, il est bien sensibilisé. Ce que j’ai mis en place c’est d’entamer une thérapie, faire vraiment un gros travail sur moi, apprendre à me connaître, apprendre à m’accepter, apprendre à me faire plaisir, apprendre à me faire des cadeaux, tout un tas de petites choses qu’avant je ne m’autorisais pas, avant, je n’avais pas l’impression d’être là tout simplement, j’avais l’impression d’être à côté de moi. Si c’était à refaire, je ne referais rien, même mes erreurs parce que c’est ce qui nous permet d’être le couple que nous sommes aujourd’hui. En revanche, si j’avais le choix, j’aurais un autre père pour mes enfants parce que lui ce n’est pas le père de mes enfants et le père de mes enfants c’est assez difficile de le supporter même si on n’est plus ensemble parce qu’on est obligés d’avoir un contact et c’est franchement un odieux personnage et même avec les enfants il est franchement pas génial, au niveau éducation, c’est un gros naze. Je n’avais pas conscience à l’époque de la personne qu’il était quand on a fait des enfants, ce serait bien d’avoir un scanner ou un truc avant… j’ai aussi tenté d’apprendre à comprendre mes comportements car moi aussi j’étais très violente avant verbalement avec mon ami, comme c’était un homme toute la violence que j’avais en moi c’est lui qui se la prenait en pleine tête et j’ai appris à désamorcer ça, maintenant, je réfléchis quand je suis en colère, j’essaie d’analyser pourquoi je suis en colère et bien souvent je me rend compte que ce n’est pas vraiment contre lui, c’est contre une situation, contre d’autres personnes, contre moi, ça permet de désamorcer les choses et on se dispute beaucoup moins et on s’entend mieux.
Sofia : J’ai entendu quelque chose qui m’a fait plaisir : je trouve que nous toutes, nous avons beaucoup de courage. C’est mon courage qui m’a tenue et ma fille parce qu’au quotidien quand on est confronté au déni de l’autre qui ne vous reconnaît pas, qui ne me reconnais pas dans mon statut de victime ça a été dur, après il y a eu la thérapie et je me fait plaisir, je fais des choses pour moi, j’ai toujours eu ce côté un peu indépendant et je pense que ça vient de l’éducation que j’ai reçu, du milieu dans lequel j’ai vécu. Mais c’est mon courage, oui, qui m’a permit d’avancer. Si c’était à refaire, tout de suite j’irais voir un thérapeute dès l’âge de 20 ans parce que j’en ai vu un j’avais 40 ans, donc, il faut faire de l’information au maximum sur ces choses là parce que moi, de 19 à 25 ans quand je vivais à Paris, j’étais célibataire, je travaillais et je vivais seule, je ne voulais personne avec moi, je m’informais beaucoup, je lisais beaucoup parce que je me souviens je cherchais des choses sans savoir quoi exactement… je cherchais pourquoi j’avais de mauvaises relations avec ma mère et je savais qu’à côté de ça j’avais un de mes frères qui m’avais incestée et que l’autre avait voulu et que je l’avais jeté, mais quand je me revois, je cherchais dans des bouquins à la bibliothèque, je cherchais dans des magazines, je ne trouvais rien de ce que je voulais, il fallait que je cherche aussi vers les maltraitances de ma mère mais ça, j’étais bébé, je ne m’en souviens pas mais mon corps s’en souvient et après il y avait l’inceste. Je trouve qu’à notre époque il y a beaucoup d’informations pour les mamans mais concernant l’inceste, il n’y a rien ou très peu et je crois que lors d’un événement à Vanves, l’association auprès des jeunes avait constaté une grande carence informative.