* Tous les prénoms ont été changés afin de respecter l’anonymat des participant-es.
Jeanne : Moi, c’est Jeanne, j’ai 31 ans, je suis mariée, j’ai 3 enfants, j’ai subi l’inceste à l’âge de 5 ans jusqu’à l’âge de 7 ans.
Émilie : Émilie, survivante de l’inceste de 5 à 12 ans par mon oncle maternel. 35 ans, toutes mes dents…
Sarah : Sarah, survivante de l’inceste, j’ai vécu l’inceste de l’âge de 9 ans à 17/18 ans et je suis bénévole au sein de l’association et j’ai 56 ans.
Sofia : Sofia, j’ai été incestée à l’âge de 7 ans par mon frère. J’ai 53 ans.
Marie : Marie-Ange, survivante d’inceste, 51 ans, j’ai du mal à dire… moi, ça a commencé toute petite… par la pédophilie et ensuite un frère jusqu’à ce que je parte à l’âge de 16 ans et je suis mariée et 3 garçons.
Iris : Iris, survivante d’inceste, victime de l’âge de 13 ans jusqu’à je ne sais pas… victime de mon père qui était associé à ma soeur et une copine. J’ai 51 ans, j’ai 2 enfants, mariée.
Elena : Bonjour, je m’appelle Elena, j’ai 34 ans, je suis survivante de l’inceste par mon père de 14 ans à 18 ans.
Véronique : Véronique, 23 ans, survivante de l’inceste par le mari de ma tante.
Arnaud : Arnaud, 36 ans, victime d’inceste de l’âge de 5/6 ans à 12/13 ans, je ne sais plus exactement par ma belle-mère, son fils et peut-être mon père, je ne sais plus.
Géraldine : Géraldine, j’ai 53 ans, survivante de l’inceste de l’âge de 5 ans à 17/18 ans par mon frère et mon grand-père.
François : Moi c’est François, je suis proche de victime, j’ai 35 ans.
Arnaud : La confiance, c’est un thème qui me met en colère parce que je ne vois pas trop ce que je peux dire sur la confiance… il y a la confiance en soi, la confiance aux autres. Aux autres, c’est clair que il n’y en a jamais eu finalement. J’ai eu des relations au sein de ma famille… déjà, qu’est-ce que c’est la famille ? En quoi on peut parler de confiance ? Tout ça, ça se travaille… la confiance c’est pas quelque chose qui est spontané, c’est quelque chose qui est sur le long terme. A l’extérieur, amis… oui, oui, oui, quelques amis en qui je peux avoir confiance. L’école pas du tout puisque mon parcours a été un petit peu chaotique. Le travail… plus ou moins pareil… en fait, je ne me pose pas de question à savoir si j’ai confiance ou pas, je vis au jour le jour en me disant « oui, celui-là a peut-être plus raison… » non, en fait, je n’ai pas confiance, c’est tout… en moi, c’est déjà compliqué, pour les autres, je n’ai pas forcément beaucoup de confiance.
Iris : J’avoue qu’aujourd’hui, en plus, j’ai 51 ans, faire confiance à quelqu’un c’est très difficile. J’ai eu la chance de rencontrer dans ma vie des gens comme mon mari… mais ça, la confiance en quelqu’un je ne peux pas. J’ai trop peur d’être trahie. Au sein de la famille, je n’ai pas de lien, je n’ai plus de lien… par contre, mon manque de confiance me rend très dépendante de certaines personnes et cette dépendance a fait que je n’ai pas pu vivre ma propre vie à moi… confiance aveugle, pas tout à fait et à l’école, la personne qui était à mon écoute ne m’a pas entendue. Et même mon mari, des fois, il y a des choses que je ne lui dit pas parce que j’ai peur de sa réaction, j’ai peur d’être trahie, on retourne les réponses qui conviennent quand ça ne nous convient pas et on laisse tomber, on fait avec.
Sarah : La confiance, pour moi, il y a une chose : la confiance en moi que je n’ai absolument pas, malgré mes 56 ans, je n’ai absolument pas confiance en moi et quand on essaie de me démontrer que je peux avoir confiance en moi j’ai honte. Par contre, confiance en les autres, je pense que j’ai tendance à avoir trop confiance, ce qui fait que je me livre un peu trop et lorsque j’ai un retour de bâton, sans être trop agressif, alors là, la confiance je ne l’ai plus du tout et là, ça devient pratiquement de la haine. Au sein de la famille, disons, que j’ai une famille qui est à la fois très grande et très restreinte puisque j’ai une soeur avec laquelle je suis très liée, alors avec elle, c’est la confiance totale et c’est réciproque. La famille, qui est une famille recomposée à côté, sans plus… à l’extérieur, ça dépend, bien souvent, trop de confiance, je voudrais que tout le monde soit beau, tout le monde soit gentil… au travail, plus ça va, moins j’ai confiance parce que c’est vrai que je fait partie des vieux maintenant et on n’a plus du tout les mêmes façons de travailler, de voir la nécessité du boulot donc ça créé des … tout ce qui va avec les jeunes et les vieux. Donc, entre confiance aveugle et absence totale de confiance, ça valse entre les deux, dès l’instant où j’ai perdu la confiance, c’est fini… on peut venir me faire des câlins et tout ce qu’on veut, c’est fini, fini. Ça se partage à longueur de journée, à longueur de mois, à longueur de semaine. J’ai passé ma vie à … je cherche à avoir confiance, j’ai envie d’avoir confiance parce que je me dit que les gens ne sont pas pourris et en fin de compte je me le prend toujours dans la tête.
Marie : Je ne sais pas trop où j’en suis dans la confiance… si, je sais, j’ai du mal à faire confiance, ne serait-ce que donner les enfants à garder, les envoyer en colo… je n’étais même pas consciente de ça parce que j’étais dans le déni mais aujourd’hui je comprend pourquoi. Je ne les ai pas trop envoyés. La famille, je n’en ai plus… les relations je dirais plutôt que je les ai subies jusqu’à il y a peu de temps. Même des amis, enfin, des gens que j’appelais « des amis » qui venaient ou qui voulaient venir chez moi, parce que je n’aime pas faire venir des gens chez moi, j’aime bien me poser dans mon jardin l’été, ils voulaient venir et m’emmerder parce que je n’avais pas envie de les voir et je me disais « mais ils n’ont pas autre chose à faire ? » , moi, je voulais rester avec mes enfants chez moi et ça, c’est des choses que j’ai subi, aujourd’hui, ça va, comme j’ai changé, j’ai fait fuir des gens, c’est bien parce qu’au moins il reste des vrais amis et je n’ai plus du tout les mêmes relations aujourd’hui mais celles que j’ai, je dirais que je les ai choisies. Je mets du temps à faire confiance aux gens parce que moi, je ne me dévoile pas du tout. C’est même la remarque d’une personne avec qui je fais de la danse l’après-midi, 6 mois après qui me disais « mais pourquoi tu ne te raconte jamais ? », mais je me disais « mais je n’ai rien à leur dire, ça ne les regarde pas ! » et en même temps, ça m’avait bouleversée qu’elle me dise ça parce que je me disais « Mais je suis comment ? » parce que je ne parlais pas de moi en fait… mais je n’avais pas forcément envie de le faire non plus. Je dirais que j’ai plutôt du mal à avoir confiance aux gens comme ça. Mon mari, c’est plutôt le contraire « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil », moi, je suis plutôt sur ma réserve tout le temps et je met beaucoup de temps à rentrer en lien avec les gens. A chaque fois on me dit « on ne sait pas ce que tu penses, tu ne dis pas grand-chose », oui, je suis comme ça…
Sofia : Faire confiance aux autres, non, ça n’a pas été pour moi quelque chose de facile. J’avais quelques fois confiance, je me suis souvent trompée. Les quelques amis que j’ai, ce sont des amis de très longues dates en qui j’ai totalement confiance avec qui je partage depuis peu d’années cet inceste, je leur ai raconté. J’ai quelques fois dans ma vie rencontré des gens en qui j’ai eu confiance, disons que ça a aidé mais ça n’a pas été suffisant. J’ai un mari qui fait confiance à tout le monde : « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil », ça c’est bien connu. Maintenant, je m’écoute moi, mon intuition, en général, ne me trompe jamais. Quant à ma confiance en moi, elle n’est pas extraordinaire, au travail, j’ai parfois réussi et là, je me plante, ma confiance en moi est très basse, elle est très abîmée.
Véronique : Pour ce qui est de la confiance au sein de la famille, je crois que il n’y en a jamais eu et il n’y en aura plus jamais. Quand j’ai révélé à mon père ce qui m’était arrivé, il a décidé de couper les ponts avec la personne concernée et pour le reste de la famille qui a été au courant, ils ont tous gardé le silence, au moins, ça a été clair. Après, au niveau de l’extérieur, des amis, le peu de personnes qui ont su m’ont soutenue, j’ai pu faire confiance à ces personnes là, après, je ne suis pas une personne qui va raconter ce qui lui est arrivé, donc, la majorité des personnes proches de ma vie ne savent rien et ne sauront rien. Le seul moment où je suis en pleine confiance, c’est au travail, je me donne à fond et je gère des équipes d’hommes, ce qui doit me mettre en confiance peut-être, donc, je gère. Après, au niveau des amis, j’ai peu de présence masculine autour de moi, ça ne me manque pas, je n’en veux pas et c’est clair qu’aucun homme à part mon père n’aura ma confiance, ça, c’est clair et net. Je ne sais pas dire « non », j’ai beaucoup de mal à dire « non », je ne sais pas si c’est du à un manque de confiance mais on me fait souvent la remarque « mais tu ne dis jamais non même quand ça t’énerve ou que tu n’as pas envie, tu dis oui pour faire plaisir ou de peur qu’on te dise quelque chose ». C’est quelque chose qui fait partie de mon quotidien.
Géraldine : Je suis entrain de m’apercevoir que je n’ai jamais fait confiance à personne, je n’avais jamais réfléchis à ça… j’ai parlé à plusieurs reprises et on ne m’a pas entendue, on s’est servi de ma parole pour autre chose et à chaque fois que les gens m’ont approchée de manière amicale ou affectueuse, je les ai laissé s’approcher et je les ai jetés… je m’aperçois que j’ai fait ça une bonne partie de ma vie, je vais travailler sur moi. Je m’aperçois que c’est quelque chose qui ne peut pas exister envers les autres si je n’ai pas confiance en moi. Ça devra venir le jour où j’aurais vraiment confiance en moi et je ne sais pas si ça arrivera.
Émilie: La confiance est un mot étranger pour moi. Au sein de ma famille, la question ne se pose pas, je n’en ai plus, j’ai rompu avec tout le monde. J’ai fait confiance à certains membres de ma famille pendant pas mal d’années jusqu’à il y a peu de temps, je pensais que mes parents allaient changer, qu’ils allaient comprendre, qu’ils allaient m’épauler, etc. Mais bon, au bout d’un moment, j’ai compris. A l’extérieur, depuis toujours, c’est compliqué, avec les amis, non, je n’ai pas confiance, jamais totalement. Quand je commence à faire confiance, je me mets en retrait. A l’école, je n’ai jamais fait confiance ni aux profs, ni aux élèves, ni à qu que ce soit parce que j’ai parlé à l’infirmière de mon collège et du lycée, elles n’ont rien fait, j’ai eu deux bouts de papier : un avec les coordonnées de la brigade des mineurs, un autre avec les coordonnées du psy du CMP. Je suis allée voir le psy du CMP qui m’a dit que je mentais, que je voulais juste me rendre intéressante mais mes parents n’ont jamais été convoqués. Au travail c’était une catastrophe parce que j’avais tout le temps des hommes comme chef, donc c’était conflictuel au début et petit à petit, ils arrivaient à m’apprivoiser, du coup, au bout d’un moment, je faisais confiance. Au début, j’étais méfiante et ensuite je me disais « non, mais tu fais ta parano, fais confiance aux gens… » Et arrivée là, quand je me livrais, je me le prenais en pleine tête parce que je me retrouvais à avoir des propositions à caractères sexuelles dans chaque boulot où je suis allée. Du coup, ça se terminait en clash à chaque fois, donc, absence totale de confiance, j’apprends à faire confiance, petit à petit en travaillant avec mon psy, j’ai des petits exercices à faire, des petits devoirs et lui, je commence à lui faire confiance parce que ça m’aide vraiment le travail que l’on fait ensemble. Mon compagnon, je ne lui fais pas confiance du tout parce que pour moi, il ment, il triche, il n’est pas fiable, donc, non, je ne lui fais pas confiance et à vivre, je trouve que c’est compliqué quand on ne fait pas confiance parce qu’on est vachement seule et on n’a personne sur qui se reposer et c’est quand même vachement fatiguant.
Elena : La confiance c’est toujours un thème difficile dans le sens où il parait qu’on apprend ça d’abord au sein de la famille et puis après on approfondit l’apprentissage quand on sort de la famille, quand on n’a pas eu ça au départ, finalement, on n’y arrive pas. Du coup, au sein de la famille, je n’en ai pas. J’ai parlé à mon frère de ce qui s’était passé quand j’ai commencé à ouvrir les yeux et à accepter ce qui c’était passé, ce qui fait très peu de temps en fait, comme beaucoup de monde aussi, il a écouté et il s’est tu. Ma mère était au courant, elle était présente, elle avait peur de lui, du coup, la famille, elle est un peu à l’écart. Et du point de vue de l’extérieur, c’est difficile, j’ai l’impression d’être double, je vais parfois jouer à essayer de faire confiance et moi je le sais que je ne fais pas confiance et du coup, je ne sais pas comment l’expliquer mais … c’est difficile. Ça signifie que pour moi, construire une relation affective pour le moment ça a été impossible parce que la confiance, c’est ça aussi. Dans le milieu professionnel, ça ne me pose pas de souci. En même temps, j’ai conscience que sortir de ça, ça passera par la confiance mais quand ? Je ne sais pas. Comment ? Je ne sais pas.
Jeanne : Moi, à avoir trop fait confiance, je n’ai plus confiance en pratiquement personne. Je me suis ramassée en amitié, au travail, je suis tombée sur des personnes qui n’étaient pas forcément fiables, qui cherchaient souvent à profiter de moi encore une fois et moi qui croyais que tout était joli, que tout était beau dans ce monde j’ai fais confiance. Maintenant, je suis un petit peu soignée ce qui fait que j’ai déjà plus confiance en mon jugement à moi envers les personnes parce que j’ai toujours tendance à me fier à ma première impression et me dire « ça va, la personne est gentille, ça doit être quelqu’un de bien » en fin de compte, je me trompe bêtement, donc, maintenant, je ne cherche même plus. Amis… j’en ai sans en avoir. Au sein de ma famille, c’est un peu compliqué, j’ai une famille mais qui n’est pas forcément là. Le vivre au quotidien c’est un peu dur parce que je me sens souvent seule, même très souvent seule.
François : Je suis proche de victime. Ça fait 12 ans que je connais Jeanne maintenant. C’est vrai que ces 12 années, notre relation de confiance a eu des hauts et des bas dû à ce qu’elle a subi quand elle était jeune. Le pire qu’on a pu vivre ensemble dans notre relation c’est suite à sa première grossesse, quand on a eu nos premiers enfants, on a eu des jumeaux et elle m’a fait … c’est là qu’elle m’a fait ressentir tout ce qu’elle avait vécu quand elle était jeune, auparavant, je ne l’avais pas ressenti comme ça, là, elle m’a fait un gros clash pour moi et après, envers moi, elle ne m’a pas fait confiance parce qu’elle avait peur que je fasse subir ce qu’elle avait subi à nos propres enfants, pour moi, c’était très, très dur à entendre, aussi bien pour elle que pour moi. Sinon, on va dire que maintenant, ça s’arrange un peu, une chance et c’est vrai que depuis qu’elle connaît un peu l’association, elle arrive à en parler avec d’autres personnes victimes, comme elle et c’est vrai que ça l’aide beaucoup un groupe de parole. J’ai confiance en elle, je pense qu’elle a confiance en moi et je pense que pour elle, c’est encore plus dur que pour moi.
Iris : En écoutant les témoignages, j’ai des souvenirs qui reviennent, les choses se bousculent un peu dans la tête. C’est vrai qu’à 13 ans, il y a une personne en qui j’avais confiance c’était ma sœur, c’est elle qui m’a trahie en me tendant un piège dans lequel je suis tombée pour que mon père puisse me violer et le manque de confiance en l’autre en général c’est assez fort parce que même prendre un ascenseur ou un bus, je suis terrifiée parce que je ne sais pas ce qui va m’arriver et ça, c’est quelque chose qui m’est resté dans la tête depuis que j’ai 13 ans : si je fais confiance, il va m’arriver un truc horrible ! Donc, je m’attends à ce que quelqu’un me tende des pièges tout le temps, pour le moment, je ne suis pas encore arrivée à dépasser ça.
Marie : Par rapport à la confiance en moi, je le sais parfois que je n’ai pas confiance en moi, ne serait-ce que pour faire des distances en voiture ou à pied dans le noir, comme j’ai eu du mal
l’autre soir, je me suis dit « j’y vais, j’y vais pas… » et ensuite, je me dis « fais confiance et ça va s’ouvrir, ça va se faire tout seul » et c’est vrai que je trouve que ça s’améliore. Quand j’ai des doutes comme ça, je me dis « fais confiance » mais c’est par rapport à moi, en me disant « mon chemin va être plus droit ».
Sarah : Moi, c’est l’inverse, j’ai un réflexe de dire « oui », de me projeter sur quelque chose, si on me propose quelque chose je vais être emballée tout de suite et où ça casse c’est au moment de partir, là, au moment de partir c’est « mais qu’est-ce qui va arriver ? » je fais le tour si j’ai bien tout fait, si j’ai bien tout prévu pour mon chat, ça devient un peu délirant, dès l’instant où j’ai dit « oui », je dis « oui » et comme je ne suis pas du genre à reculer, si j’ai donné ma parole, je peux le regretter vraiment mais j’irais. C’est l’histoire de la confiance en soi. Au départ, je suis partante pour tout parce que je me dis que ça va m’apporter quelque chose, ça va être vivant, c’est la vie et au moment de passer à l’acte… mais j’ai toujours fonctionné comme ça et je pense que c’est mon mode de fonctionnement.
Géraldine : Depuis tout à l’heure j’ai un truc qui me trotte dans la tête c’est « Aies confianceeeeeeee… », Désolée, mais je vois ce serpent avec Mowgli…
Émilie: Je réfléchissais à la confiance dans le couple, c’est un problème pour moi, un gros problème et je me disais que j’aimerais bien faire confiance à un homme qui partagerait ma vie, avec qui on aurait des relations saines, ce serait simple, on ne se prendrait pas la tête et je ne serais pas tout le temps entrain de me dire « mais quel coup de Trafalgar il va encore me faire ? » mais c’est vachement compliqué… parce que j’ai déjà été mariée une fois et c’était épouvantable, je me suis mise en couple une seconde fois et je suis franchement tombée de haut. Beaucoup trouvent mon compagnon formidable, ils ne savent pas tout et c’est vrai que j’ai énormément de mal à faire confiance et du coup à la maison, je régente tout, c’est hyper difficile parce que j’ai tout le temps l’impression d’être débordée et en même temps je ne sais pas si je laisse suffisamment de place pour regagner cette confiance. C’est compliqué, des fois je me dis que je vivrais bien toute seule avec mes enfants…
Sofia : Moi aussi quand je me suis mariée, j’avais confiance en mon mari, pour moi c’était une évidence et il s’est avéré que 2 ans après la naissance de ma petite fille, maintenant c’est une grande fille, elle a 24 ans, j’ai voulu aborder le sujet de l’inceste avec mon mari parce que je considérais que c’était important qu’il le sache et surtout je voulais qu’il m’aide à protéger notre fille par rapport à la famille, à la sienne comme à la mienne, surtout à la mienne parce qu’à l’époque on les voyait et quand on les voyait je voulais quand même que l’on soit vigilant. Et il m’a dit que de toute façon c’était mon problème et que ça ne le regardait pas… ce jour là, c’était fini, c’était fini parce que vivre au quotidien en couple, pour moi, la confiance, c’était la base d’une relation donc, je le vis au quotidien… tout à l’heure quelqu’un disait que c’est difficile de faire confiance, oui, surtout en couple, pour moi, ça a été dramatique donc je suis seule au quotidien. De plus, comme je vis avec quelqu’un qui voit tout le monde beau et gentil… c’est lourd. Du coup, j’ai redoublé de vigilance autour de ma fille, c’est vrai que mon mari a été quand même vigilant par rapport à notre fille mais il n’a jamais accepté de m’entendre parler de quoi que ce soit en ce qui me concerne et ça, c’est terrible ! Pour moi, c’est quelque chose de terrible !
Jeanne :Je vais rester dans la relation de confiance au sein du couple. Quand je suis sortie du déni, ça a été horrible parce que j’étais enceinte et quand mes enfants sont nés, je n’avais plus du tout, du tout confiance en mon mari, il ne devait pas les approcher, pas les changer, pas les habiller, pas les toucher. Comme c’était des jumeaux, je n’ai pas eu trop le choix de me laisser aider parce que je ne gérais pas les deux en même temps mais ça a été super, super dur à vivre parce que j’étais tout le temps aux aguets, je surveillais tout le temps ce qu’il faisait. Il l’a compris. Ça a été dur pour lui aussi mais il a fallu que je fasse un gros travail sur moi-même pour arriver à dépasser tout ça. J’ai eu un troisième enfant et là, j’ai confiance en lui, je sais qu’il ne leur ferait jamais de mal, qu’il ne leur ferait pas ce que moi j’ai subit, il ne fallait pas que je me trompe de personne. Dans le couple, par rapport à mes enfants, j’ai confiance, après pour le reste c’est un autre sujet…
Sarah : En ce qui concerne la confiance en l’homme de ma vie, il faut quand même savoir que j’ai été mariée 3 fois, divorcée 3 fois, donc, effectivement, j’ai fait confiance et ça c’est bien retourné contre moi. Par contre, là, ça fait 12 ans que je suis avec le même ami et lui, j’ai eu tout à fait confiance dès le début et ça a été très bien parce que bon, finalement il m’a permis d’être celle que je suis maintenant et d’avancer, de croire en moi-même si je n’y crois pas trop mais je finis quand même par accepter un certain nombre de choses. J’ai un peu le retour du bâton en ce sens que j’ai tellement confiance en lui que j’ai besoin de lui en permanence, j’ai du mal à prendre des initiatives toute seule, quand je décide quelque chose, effectivement, je le décide parce que c’est ma vie, c’est moi et on ne vis pas ensemble, pas sous le même toit, lui, il a sa vie, moi, j’ai la mienne mais bon, j’ai du mal à m’engager vraiment et fermement sur quelque chose si je n’ai pas son aval alors que je sais très bien que jusqu’à maintenant chaque fois que je lui ai demandé quelque chose, il ne m’a jamais dit « non » ou est-ce que je ne lui ai jamais rien demandé ce qui fait qu’il n’a jamais eu à dire « non » ? Effectivement ça a toujours été censé mais j’ai une confiance aveugle en lui, c’est le seul en qui j’ai vraiment une confiance aveugle et le problème c’est que j’ai besoin de cette confiance là. Ce besoin, il est né et il grandit.
Géraldine :Je crois quand même que si on est là aujourd’hui c’est que quand même quelque part en nous il y a… rien que notre présence c’est quand même de la confiance. C’est une forme de confiance finalement d’être là et de partager quelque chose avec d’autres gens qui sont comme moi.
Iris : Ce qui m’a permis de faire la différence, c’est justement la peur de « l’autre », c’est par moi-même que j’ai appris à me méfier, à ne pas faire trop confiance aux autres. Pour me faire confiance, je n’y suis pas encore…c’est très difficile parce que je me sens toujours coupable de ce qu’il m’est arrivé donc je me sens inférieure par rapport aux autres en général et pour le moment ce qui me fait avancer sur ce point c’est ma thérapie, le soutien de mon psychiatre et moi-même qui prend conscience et confiance petit à petit en la valeur que j’ai et en faisant des exercices plus ou moins difficiles, actuellement, depuis la rentrée, je réapprend à faire confiance à prendre tout simplement l’ascenseur : 2 étages, je ne pouvais pas avant être enfermée comme ça, j’étais certaine qu’il allait m’arriver un malheur. Aujourd’hui, je m’entraîne, c’est avec des petits exercices comme ça que je réapprends à faire confiance, à me dire « il ne m’arrivera rien de mal et s’il m’arrive quelque chose de mal, je peux gérer», je peux être capable de gérer la situation par moi-même, je ne suis plus en état de dépendance envers les autres.
Sarah : Ce qui m’a permis de faire la différence, c’est la vie tout simplement. A force de se prendre des claques, on essaie d’agir et de réagir différemment mais chassez le naturel il reviendra au galop. J’ai confiance en l’humain et je veux avoir confiance en l’humain, ce qui fait que je me dis que le monde est pourri mais il peut ne pas être pourri, sinon pourquoi il serait pourri ? C’est pas pour me tordre les quelques neurones qui me restent mais j’ai l’impression que je ne sais pas la différence entre faire confiance et faire trop confiance, c’est naturel chez moi et par contre, comme je disais tout à l’heure, si la confiance est perdue, elle est perdue, elle est perdue irrémédiablement, la personne peut se mettre en 4, en 25, en ce qu’elle veut, c’est fini, c’est fini, je ne suis pas du genre à me fâcher, à tourner le dos mais c’est terminé « bonjour, bonsoir, au revoir, au plaisir de ne pas se revoir» . Moi, je n’ai pas été aidée par la vie dès le départ, maintenant j’avance dans la quête de ma vie, je cherche à comprendre, je cherche à savoir, à mettre des mots sur les choses et du coup j’arrive à ranger les tiroirs et me dire « voilà, ce tiroir est rangé, je peux fermer la porte, peut-être que je le rouvrirais un jour » mais ce n’est pas évident d’arriver à prendre quelque chose et le classer au bon endroit surtout quand ça s’étale sur des années et des années, une personne vous dit un truc, l’autre vous dit l’autre, il faut arriver à mettre le puzzle en place et ce n’est pas évident donc, je n’ai pas fini encore, je continue et ça me permet de me faire confiance à moi parce que je me dis que dès l’instant où j’ai envie d’avancer c’est que quelque part j’ai confiance en moi, même si par principe je n’ai pas confiance. Mais si j’arrive à nominer les choses, je me centre dessus et tant que je n’ai pas une réponse qui me convient, je vais buriner dessus jusqu’au moment où je vais pouvoir fermer le tiroir. Il y a des choses où c’est le bordel et pour fermer le tiroir c’est difficile.
Arnaud : Ce qui m’a aidé à me faire confiance c’est curieusement la mort des autres, j’ai eu des personnes qui sont mortes dans des circonstances… il y a eu des suicides etc. qui m’ont aidé à rebondir et à essayer de me recentrer sur moi-même et c’est peut-être la prémisse de la sortie du déni qui a eu lieu il y a un an… en fait, je fais confiance aux gens qui sont morts, c’est curieux… il y a eu des suites d’événements que je me suis créé moi-même avec l’aide de mon amie, ça n’a pas été facile dans le couple parce qu’elle-même a été un peu décontenancée par l’histoire d’inceste.
Géraldine : Je crois que les prémisses d’une certaine confiance en l’autre sont peut-être venues avec le psy, avant tout c’est quelqu’un qui n’est pas proche de moi, c’est quelqu’un qui n’a pas d’émotion pour moi, il n’a pas de sentiment, c’est quelqu’un de l’extérieur, c’est peut-être à partir de ce moment là où j’ai peut-être accepté de me faire un peu confiance et d’oser lâcher les choses, de les dire, de les exprimer et les supports… j’ai beaucoup, beaucoup lu et regardé de films sur l’inceste, j’essaie un peu de suivre mon instinct, en parlant de la confiance, je crois que c’est un peu instinctif aujourd’hui, je sens qu’il faut que j’aille vers ça, qu’il faut que j’aille au fond des choses pour vraiment arriver à évoluer mieux. C’est ça, la confiance c’est mieux grâce et avec le psy parce que ce n’est pas quelqu’un de proche en fait tout simplement.
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Émilie : Je me suis aperçue que je faisais trop confiance à l’époque. Au niveau professionnel, mes chefs hommes, du haut de leur fausse bienveillance, au départ j’étais méfiante et ensuite, je me disais « mais non, c’est moi qui suis parano, fais confiance » et ils me posaient tout le temps tout un tas de questions, « on va boire un café » et je te pose plein de questions sur toi et moi, je devais un peu tout mélanger dans ma tête, je devais un peu les prendre pour un « papa » ou je ne sais quoi et du coup, je racontais tout, mais tout ! C’est-à-dire « j’ai été victime d’inceste patati, patata… » et après, leur comportement changeait complètement, ça devenait n’importe quoi et petit à petit je me suis dit « mais il faut peut-être que j’arrête de dire à tout le monde que j’ai été victime d’inceste parce que tout de suite les gens changent… ils ont l’impression que je suis une débile» ils ne me voyaient plus de la même façon. Du coup, ma réaction changeait aussi puisque je voyais qu’en face l’intérêt n’était plus le même et ça allait au clash… donc, petit à petit je me suis un peu mise en retrait par rapport à ça, par rapport au monde professionnel, ça m’a permit quand même de mesurer un peu mes propos, de ce que je pouvais donner de ma vie perso y compris avec les collègues de travail parce que les femmes entre elles, elles ne sont pas tendres non plus. Ce qui m’a aidé à me faire confiance à moi c’est d’avoir réussi à dégager mon ex mari, ça m’a beaucoup aidée dans ma prise de confiance en moi parce que je me suis dit que je ne reproduisais pas le même schéma que ma mère, elle était restée avec mon père violent 18 ans soi-disant « pour nous », ses enfants, pour ne pas nous priver d’un père violent parce qu’on ne sait jamais ça nous aurait peut-être manqué…bref… j’étais assez fière de ça parce que je me suis dit « je n’ai pas fait comme elle », j’étais bien contente quand il est parti, ça m’a vraiment aidé à me réapproprier ma personnalité, à découvrir qui j’étais parce que j’étais vraiment enfermée entre 4 murs avant, il ne voulait pas que je travaille, je n’avais pas le droit d’avoir le chéquier, pas le droit d’avoir la carte bleue, je ne pouvais rien faire, je n’avais plus d’ami et le fait qu’il ne soit plus là, ça ne parait peut-être rien mais j’ai récupéré un chéquier, une carte bleue, des amis, j’ai pu sortir, retravailler. Quand je suis sortie du déni, vers la trentaine, c’était compliqué mais en même temps je crois que ça m’a permis de me connaître, j’avais la sensation qu’avant je n’étais pas moi et il y a une personne, qui m’a beaucoup aidé à avancer sur la confiance, sur mon chemin parce qu’elle a été là de nombreuses fois, il y a elle qui était très présente, l’association, le théâtre, tout ce que j’ai pu mettre en place ça m’a beaucoup aidé. Petit à petit, ça avance.
Jeanne : Je ne fais pas forcément la différence encore entre faire confiance et faire trop confiance. Je n’accorde plus ma confiance à n’importe qui par contre quand je la donne, je la donne ! Ce qui m’a aidé à me faire confiance c’est d’avoir révélé mon passé à ma famille, j’ai été soutenue, j’ai été aussi non soutenue et les gens qui ne me soutenaient pas je les ai envoyé balader : mon père, par exemple, j’ai subi longtemps ses menaces : que si je le révélais il allait se suicider et au bout d’un moment j’ai su lui dire « ok, fais-le ! Je m’en fiche, je sais ce que j’ai à faire…» Qu’est ce qui m’a aidé ? Le fait d’avoir vu un psychiatre qui m’a aidée mais qui ne m’a pas aidée à m’en sortir parce que c’est grâce à lui…enfin, ce n’est pas grâce à lui mais c’est lui qui m’a conseillé de porter plainte, qui m’a encouragé à le faire et il était derrière moi, mes proches, ma maman, mon mari qui sont là quand ils peuvent et ce qui me permet d’avancer aujourd’hui c’est l’association parce que depuis que je connais Le Monde à Travers un Regard je vais de l’avant, même si mes journées ne sont pas roses tous les jours, je m’en sort petit à petit, je vois de la lumière enfin et c’est grâce à l’association parce que je peux dire ce que j’ai envie de dire quand je ne vais pas bien et par les actions qu’elle mène, par le soutien.
Elena : Je ne prends pas de risque, je ne la donne pas ma confiance, mais du coup, je n’avance pas non plus. Ce qui m’a aidé à me faire confiance c’est le fait d’avoir rompu le silence, d’être allée voir quelqu’un, un professionnel. Le peu de confiance que je peux donner c’est dans un univers professionnel comme je disais, donc, le fait de rompre le silence avec un professionnel c’est déjà commencer à donner de la confiance. Un soignant, normalement, c’est son travail, il ne va pas juger… donc, c’est un tout début de chemin, il y a encore pas mal de choses à faire.
Marie : Je ne crois pas que je fasse trop confiance parce que je suis toujours méfiante. Je met du temps à me mettre en lien avec les gens et je les observe beaucoup, peut être même trop d’ailleurs et me faire confiance…je ne sais pas parce que des fois j’ai des doutes, je pense que ça va avec la confiance, les doutes, ça va avec…si, il y a des choses pour lesquelles je me fais confiance c’est par l’association et il y a un endroit où je suis bien c’est ici parce que là, je sais que je peux faire confiance aux gens qui sont autour de moi. Par rapport aux éléments extérieurs, je dirais que le travail… je travaille à la maison, j’ai choisi ça parce que je garde un petit enfant et je sais que je ne crains rien du tout, c’est vrai que l’année prochaine, je ne vais plus l’avoir et je me dis « hou lala, s’il faut que je retourne à l’extérieur… », le dernier travail que j’ai fais, j’y allais en pleurant donc je sais que…c’était bizarre parce que je sais faire ce travail là et pourtant j’arrivais en pleurant en me disant « je ne vais jamais y arriver » et ça ne suffisait pas de se dire « ça y est, la journée est finie »,non, « demain, tu recommence » et le lendemain je recommençais à pleurer et c’était comme ça et je n’ai pas envie de revivre ça. Je ne sais pas si j’essaie de fuir mais je trouve des solutions comme ça, avec un petit enfant, là, au moins, il ne risque rien de m’arriver et je ne risque pas d’entendre des choses désagréables parce que je trouve que le monde adulte est parfois difficile, surtout dans le travail, c’est un monde, pour moi, qui est hostile. J’ai plein de peurs, par exemple, il n’y a pas longtemps, j’ai une amie qui m’a demandé de nourrir son chat, elle habite au 4ème étage et l’ascenseur ne marchait pas… il n’y avait personne évidemment derrière la porte et pourtant, rien que le fait d’ouvrir la porte et de monter les étages, j’ai monté ça en quatrième vitesse et je suis arrivée crevée et je suis redescendue pareille, tout le long du chemin, c’était « est ce que je vais rencontrer quelqu’un ? » et je vis la même chose chez moi dans la cave, j’ai toujours un problème avec cette porte, alors je l’ouvre et VLAN ! Elle se cogne dans le mur et ça, ça reste, je ne sais pas comment ça passe non plus. Je pense que ça peut faire partie de la confiance ça…c’est pareil, c’est tout ouvert chez moi, c’est pas tout à fait illogique non plus, je ne sais pas comment travailler ça, j’ai mis du temps aussi avec ma psy a lui faire confiance parce qu’il n’y a que cette année où je lui ai raconté ce que j’avais vécu, c’est pas que je ne lui faisais pas confiance mais je ne sais pas… ça met du temps. Je pense quand même que j’avance, je me fais quand même confiance, c’est comme quand je prends ma voiture, il faut que ça roule, il faut que je me fasse au quotidien je pense pour y arriver.
Véronique : Pour moi, faire confiance, c’est déjà trop faire confiance, pour moi, il n’y a pas de différence, la confiance c’est tout ou rien. L’entourage ne m’a pas aidée à me faire confiance puisque ça a été « le silence est d’or » par contre, l’ami de mes parents qui a appris ce que j’avais vécu quelques mois après l’avoir révélé à mon père m’a fait rencontrer une association qui m’a aidée un petit peu. En fait, cette personne qui m’a aidée, elle m’invitait chez elle régulièrement et son plus grand plaisir quand j’arrivais chez elle c’était de dire devant tous ses amis ce que j’avais vécu et qu’à la place de mon père elle aurait tout fait pour que ça aille plus loin, elle n’aurait pas gardé le silence, elle se serait battue et à chaque fois que je la voyais, à ses amis qui n’étaient pas censés être au courant, elle étalait mon passé, elle étalait cette force qu’elle croyait avoir sur mon passé alors qu’elle n’en faisait pas partie et je crois qu’à force des années, de l’entendre parler comme ça de moi, ça m’a rendue plus forte parce que j’ai compris que j’étais victime mais je ne voulais pas l’être dans le futur. Il y a 5 ans, j’ai rencontré une femme qui a partagé ma vie jusque là puisque je suis homosexuelle, qui m’a appris à parler, à dire ce que je pouvais ressentir, à ne plus dire oui ou non à n’importe quoi, qui m’a fait prendre confiance en moi aussi, y compris dans les rapports sexuels parce que en en ayant eu avec des hommes, je ne sais même pas pourquoi j’en ai eu d’ailleurs, certainement pour faire comme tout le monde ou pour dire que je l’avais fait, avec cette femme j’ai appris à changer d’attitude face à ça, à certains gestes qui pouvaient faire penser à ce que j’avais vécu dans le passé, elle m’a permis d’avancer ces 5 dernières années, je pense que sans elle je n’en serais pas là où j’en suis aujourd’hui.
Sofia : Je ne fais jamais totalement confiance, ça c’est sûr. Quand je suis déçue par quelqu’un, je le vire de ma vie et basta. Il y a quelques années, quand j’étais encore en province, j’ai fait une thérapie et la thérapeute au bout de la deuxième séance m’a dit « mais faites moi confiance », ça m’a un peu boostée. Dans mon entourage familial il n’y a personne, hormis mon père mais je n’ai jamais pu lui en parler parce que j’avais trop honte, ma mère ce n’était même pas la peine de lui en parler parce qu’il n’y avait que ses fils qui étaient très bien. Par contre, mes parents avaient un couple d’amis, je n’ai jamais pu leur en parler mais j’étais bien affectivement avec eux et en confiance donc ça m’a aidée et lorsque j’ai démarré ma vie professionnelle ça m’a beaucoup aidée, eux, ils ont beaucoup compté dans ma vie. Il y a eu des réussites mais malheureusement annulées par la personne avec laquelle je vis parce que c’est quelqu’un qui n’accepte pas que je puisse avoir confiance en moi, au fond, il faut que je reprenne tout à zéro.
François : La relation de confiance est un travail de longue haleine, ça a été dur tous les jours parce que quand on a vécu la naissance des enfants ça a été un travail de tous les jours parce qu’elle ne me faisait pas du tout confiance. Je me sens parfois démuni et démuni c’est un petit mot parce que franchement, je ne sais pas comment faire pour l’aider ou même pour l’entendre parce que parfois je fais la sourde oreille parce que quand elle veut en parler, moi, ça me fait du mal, je sais qu’elle va m’en parler mais je ne sais pas si elle comprend que je ne veux pas forcément l’entendre, ça me fait du mal aussi, c’est quelque chose de très dur pour moi à entendre.
Iris : Au niveau de la confiance ce qui a été important pour moi ça a été de trouver un groupe de parole pour pouvoir parler et rencontrer des personnes qui vivaient la même chose que moi, je ressentais moins de souffrance, ensuite, ça me permet de sortir, de dire ma peine, d’entendre aussi l’avis des autres et ça m’aide à prendre conscience d’un tas de choses et justement aussi à reprendre confiance. Ici, je fais confiance aux personnes qui sont là, présentes, jamais je pensais que je les aurais tutoyées, que j’aurais confiance et j’espère que j’ai raison. C’est une partie importante de ma vie dans l’avancement de ma thérapie.
Émilie: Sur mon rôle de maman, au niveau de la confiance, il y a un truc super difficile pour moi à vivre, j’ai 2 enfants, un ado et un enfant et c’est très difficile pour moi parce que depuis que le grand est adolescent, j’ai sans arrêt la crainte qu’il agresse le plus petit, c’est super difficile à vivre, j’essaie d’être rationnelle, de me dire que non, qu’à priori, il n’y a pas de raison mais en même temps, ils partagent la même chambre et c’est vrai que chaque soir, quand je les laisse tous seuls, ça me traverse l’esprit, ça m’angoisse, quand ils chahutent tous les deux dans la chambre, ça m’angoisse, je cours voir ce qu’ils font, je suis sans arrêt entrain de me demander, de me poser des questions, j’essaie de me raisonner tout de suite mais ça me travaille beaucoup. En plus, ils sont vraiment sans arrêt entrain de chahuter, dès qu’il y en a un qui va aux toilettes, l’autre gratte à la porte pour l’embêter, ce sont des pitres et moi je suis sans arrêt derrière entrain de vérifier qu’il ne se passe rien, j’aimerais vraiment dépasser ça parce que ça me mine, ce sont vraiment des pensées qui me parasite et ça m’énerve.
Arnaud : Je n’aime pas ce thème, il me dérange trop…comment parler de confiance après avoir subi autant de choses abjectes ? La confiance rime aussi avec liberté et cette liberté là, elle existe pour moi depuis que je suis sorti du déni, elle se reconstruit peu à peu, d’abord, c’est une confiance en soi-même, c’est se respecter, peut-être qu’ensuite j’arriverais à avoir un peu plus confiance aux autres mais le thème me dérange profondément.
Jeanne : J’ai travaillé 4 ans dans une usine principalement d’hommes et j’étais sortie du déni ça faisait 2 ans, donc, je n’étais pas forcément bien dans ma tête, pas forcément bien dans mon corps non plus parce que je sortais d’une grossesse. Dans cette usine il y avait beaucoup de beaux parleurs, qui étaient bien gentils avec moi au départ, mais qui en voulaient plus par la suite et moi je n’ai rien vu venir, toutes ces relations se sont transformées en harcèlement sexuel. On m’a tripotée, on m’a forcée à embrasser et je ne disais toujours rien ! Pourtant, je n’avais pas confiance en eux, je n’avais pas confiance en moi non plus mais je me sentais fautive parce que je me disais c’est moi qui n’ai pas su mettre des barrières dès le départ, j’aurais dis non dès le départ, ça ne serait pas arrivé.
Sarah : J’ai toujours eu un souci au niveau de la confiance c’est envers les femmes. J’ai une haine de la femme, je ne me sens pas femme et la femme c’est faux, c’est systématiquement faux. Par contre, j’ai confiance en l’homme, pourquoi j’ai confiance en l’homme alors que mon agresseur est un homme ? Je ne sais pas. Par contre, lorsque ma haine intervient après un échec de confiance alors là, c’est complètement irrationnel, je lui souhaite la mort dans les pires souffrances, ça devient du délire complet. Par principe, je n’ai pas confiance en la femme.
Elena : Moi, c’est ce thème là qui m’a fait venir. Je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi mais je sais que la vie elle est là. Même si je ne sais pas comment faire, je suis sûre que c’est quelque chose de précieux, pour l’instant, effectivement, ce n’est pas ça mais je pense que c’est un peu comme un langage, une langue qu’on doit apprendre, on ne l’a pas appris depuis tout petit, on galère un peu mais je pense qu’il n’est jamais trop tard.