J’ai 34 ans, j’ai été victime de l’inceste de 5 à 12 ans. Je suis maman de deux petits garçons qui ont 9 et 13 ans.
J’ai été enceinte pour la première fois à 19 ans. Sortant de la rue et de la toxicomanie et étant en reconstruction, j’ai été effrayée par cette grossesse inattendue…je ne me sentais pas capable de m’occuper de qui que ce soit, ni de moi-même et encore moins d’un enfant. Mais grâce au soutien de proches, je l’ai gardé, j’en suis aujourd’hui très heureuse.
Les premiers examens gynécologiques ont été un calvaire : me déshabiller, enlever ma culotte, m’allonger jambes écartées devant un médecin qui trifouillais à l’intérieur de moi et ne me parlais pas…j’avais envie de pleurer, mais je ne disais rien.
J’étais partagée : heureuse d’attendre ce bébé car j’avais énormément d’amour à donner, moi qui n’en n’avais jamais reçu de ma famille ; et voyant mon corps changer j’avais peur, je ne me sentais pas femme mais enfant…les petits coups de pieds du bébé, je les vivais comme des coups de poings…je ne supportais plus rien, plus le monde extérieur, plus les autres. J’ai été mise en arrêt maladie à cinq mois de grossesse sans que l’on me propose de suivi psychologique…seule avec moi et ce bébé qui grandissait en moi…L’accouchement a ensuite été un enfer, quatorze heures de douleur, un magnifique bébé mais que je ne pouvais ni toucher, ni allaiter malgré la lourde insistance du service hospitalier.
Concernant ma seconde grossesse, quatre ans plus tard, j’ai mieux vécu les changements de mon corps mais me suis arrangée pour prendre le moins de poids possible. J’ai eu la sensation que l’accouchement se passait bien mais les médecins ont craint un arrêt cardiaque et j’ai fais un hématome rétroplacentaire. La suite fut plus rude, mon bébé pleurait beaucoup mais psychologiquement, je ne supportais pas ses pleurs, ce la me faisait mal, me mettait dans une grande détresse. Aujourd’hui encore, je ne supporte pas les pleurs d’un enfant, je panique vite.
Ce que j’aurais aimé et qui m’aurait été salutaire, je pense, c’est avoir une écoute, un regard, une empathie que je n’ai trouvé, à l’époque chez aucun médecin. Je suis restée à pleurer dans ma chambre en maternité dans une grande indifférence et j’espère qu’aujourd’hui, les choses évolueront petit à petit.