ARTE. THEMA “crimes d’inceste”4 mai 2010

« Inceste : Familles empoisonnées »

Un film de  FABRICE GARDEL & JULIETTE ARMANET
Durée : 50 ‘
Année : 2010
Producteur : Daniel Leconte
Avec Sandrine, Nicolas, Valérie et Nadia, membres de l’association Le Monde à Travers un Regard

Sept victimes d’inceste, âgées de 23 à 60 ans, racontent comment leur enfance leur a été volée par des proches. Ils viennent de tous horizons, de tous milieux .
Qu’ils soient oncles, grand-pères ou pères, les mécanismes que les violeurs mettent en place se ressemblent. Cela commence par le rituel de l’intimidation, de l’autorité face à l’enfant pétri d’effroi, qui ne comprend rien à ce qui lui arrive avant de basculer dans la culpabilité. En perte de repères, submergées par le silence de l’entourage , la lâcheté de toute une famille, par une immense solitude, les victimes tombent dans le dégoût d’elles-mêmes.

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 Ce qui est exceptionnel c’est d’avoir la force, le courage de parler de leur enfance trahie
Ils sont une infime minorité à sortir du silence”

DEBAT

“Dans l’inceste, toute la famille est malade”

Enfant, Sandrine a subi un inceste. Elle témoigne ce soir sur Arte. Elle a créé avec d’autres victimes, une association d’aide et de soutien , Le Monde à Travers un Regard.

Quels sont les mécanismes de l’inceste?

Sandrine Apers : C’est une toile d’araignée jetée sur l’enfant. Quand un adulte en qui il a confiance lui fait ça, il ne comprend pas. Il ne dit pas non. Ce n’est pas comme si un étranger l’agressait, il y a un lien affectif. L’enfant est sous emprise, seul, muré dans le silence. Il se sent complice… Et quand c’est arrivé une fois, que personne n’a rien dit, ça se reproduit forcément, de plus en plus fréquemment et il est de plus en plus difficile de dire non.

Comment le silence s’installe-t-il dans la famille?

L’inceste, ce n’est pas juste l’agresseur et l’agressé. Toute la famille est malade. Personne ne veut voir. La première fois où mon oncle m’a touchée, mon père l’a surpris et l’a ramené violemment dans la maison. Mais c’est tout…

Comment cela s’arrête?

Il y a plusieurs cas de figure. Certains agresseurs ne sont plus attirés par les corps qui se transforment. Moi, un jour, j’ai pris un couteau et j’ai dit stop à mon oncle. Mais il y a tant de cas où cela continue : des jeunes filles enceintes de leur père, des adultes encore sous domination…

Comment étiez-vous enfant et adolescente?

J’avais la sensation d’être différente, mais je ne pensais pas tout le temps à ça. Je me sentais sale, pas intéressante. J’étais très timide et donc très seule. On a aussi l’impression d’être fou, que c’est notre comportement qui est anormal. A l’adolescence, on est encore plus renfermé. Les conséquences de ce mal-être sont multiples : anorexie, boulimie, tentatives de suicide…

A un moment, des victimes tombent dans le déni…

Oui, on enfouit. Le temps passe et un jour, tout explose. ça peut être à n’importe quel moment. Souvent, les femmes victimes d’inceste vivent mal leur grossesse. Elles doutent de leurs capacité à être de bonnes mères, à pouvoir protéger leurs enfants.

En avez-vous parlé à vos enfants?

Oui. J’ai abordé la question par le biais de livres et je leur ai dit que ça m’était arrivé. Ils ont posé beaucoup de questions. Ils ont eu du mal à comprendre pourquoi personne n’avait prévenu la police, pourquoi le coupable n’était pas en prison…

Procès : les victimes limitées par le temps…

Les victimes mettent souvent trop longtemps avant de parler. Et il est trop tard pour porter plainte contre son agresseur.

Le délai de prescription désigne la durée pendant laquelle il est encore possible d’intenter une action en justice. Selon la loi de 2004, toutes les victimes d’inceste nées après le 11 mars 1976 peuvent porter plainte contre leur agresseur 20 ans après leur majorité, c’est à dire jusqu’à l’âge de 38 ans. Les personnes nées avant cette date et qui n’ont pas parlé n’ont plus la possibilité de le faire.

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