Une mère. Si vous passez par ici…

 

Parents,conjoints,proches,enfants, amis de victimes d’inceste, de violences sexuelles.

29 décembre 2015 

Mon fils a été victime d’inceste paternel  pendant les droits de visite et d’hébergement. Il m’en a parlé l’année de ses 20 ans.

Envie de dire quelque chose avant que l’année finisse… 

S’il y a ici des parents ,des conjoints, des proches ,des enfants, des amis de victimes d’inceste, ou plus largement de violences sexuelles. Si vous passez par ici…

j’ai été effarée et choquée de constater le fréquent abandon des victimes d’inceste par leur famille et les négligences et brutalités de toutes sortes dont ils peuvent faire l’objet, de la part de la justice , de médecins.
Pourtant…
Avoir été victime d’inceste , c’est avoir sa vie explosée dès l’âge de l’innocence, de l’enfance . C’est la source pure et fraîche , joyeuse, transformée en boue lourde et collante dès les premiers pas . c’est gravir chaque journée plus qu’un Himalaya, c’est un effort sans mesure .

Nous les proches, nous avons pu connaître l’angoisse, le chagrin, mais dans les moments les plus durs , les plus terrifiants, les plus angoissants de notre vie, nous n’avons jamais connu quelque chose qui ressemble de près ou de loin à ce que vit notre enfant, notre frère ,notre sœur, notre conjoint,notre mère, notre cousin ou cousine,notre ami

Pouvions nous imaginer que ces violences sont des traumatismes si graves qu’ils modifient certaines zones du cerveau ? Que c’est visible à l’IRM? Qu’elles laissent des traces jusque dans l’ADN?

Lorsque nous apprenons l’inceste , la violence sexuelle ,dont a été victime notre proche nous ne savons encore rien ,nous avons tout à apprendre.

Ce n’est pas nous qui savons, même quand nous sommes parent.
Nous n’avons pas vu, pas compris, pas protégé, pas deviné. Comme moi. Ce n’était même pas pensable. Ne passons pas trop de temps à nous battre nous même,faisons nous aider , car notre proche qui vient de se confier a besoin de nous .
Non, nous ne saurons pas, sans apprendre …. pour éviter les « ça fait longtemps, il faut tourner la page », » il faudrait passer à autre chose », ‘c’est le présent qui compte », pourquoi tu n’as rien dit avant? , » « secoue toi » « fais du sport » «travaille» etc.. Des mauvais mots, à la place des bons mots . Les phrases assassines comme disent les victimes survivantes.

Nous dirons même parfois , « mais il ou elle a l’air d’aller bien », » il ou elle rit, « il ou elle sort avec ses amis ». 
Eh bien pour la première fois de notre vie ,peut être, nous avons devant nous un(e) survivant(e) qui rit , qui chante, qui fait la fête, qui sort avec ses amis. Apparences, masque… il ou elle fait ‘bonne figure’ . Pour vous? pour elle…?
Les rires meurent, il ou elle peut trop boire, se droguer, se scarifier, cesser de dormir, s’isoler, ne plus pouvoir travailler, plonger comme un ou une forcenée dans les études , le travail le plus dur, le sport de manière intense, ou ne plus se lever du canapé, ne pas se nourrir, trop manger. Pour supporter. Supporter les cauchemars, les flashes qui font revivre les faits, le crime, la terreur, les odeurs, les sons autour, comme au moment des faits. Il ou elle peut avoir tout le corps envahi de douleurs.…etc
Notre ami, notre cousine,notre mère,notre père, notre enfant, n’a rien fait pour être agressé. Il a suffit qu’il soit un enfant. À 4 ans ou moins, 6 ans , 10 ans ou plus.. .il ou elle faisait confiance à un adulte censé le protéger . Impossible de se défendre, là encore nous avons à apprendre pourquoi.

Nous avons dans notre entourage cette personne victime de crime, d’un courage exceptionnel. Et nous sommes là, avec nos moyens, maladroits, nos mots de tous les jours, qui parfois tombent à côté. Lui dire quand il parvient à se confier , que nous le croyons à 100% ,qu’il ou elle peut compter sur nous . Prenons parti pour lui, pour elle à 100%, aidons le, aidons la à aller mieux, à assumer financièrement sa thérapie par exemple, cotisons nous à plusieurs… Pourquoi pas ? Fidèles, tenaces, persévérants.

Ce que j’ai reçu dans ma famille quand j’espérais du soutien?  » c’est si grave qu’il n’y a qu’une mère pour pouvoir aider » : Histoire de nous laisser tomber.

L’enfant victime d’inceste qui a grandi est trop souvent expulsé de sa famille d’enfance quand il a parlé, expulsé par la commode accusation de mensonge, le rejet, l’indifférence, le désintérêt, la lassitude, le « c’est compliqué » »on ne sait pas quoi dire », il peut avoir à survivre dans une solitude extrême, et dangereuse. Dont personne ne voudrait.

Alors choisissons la, elle . Choisissons le, lui.

Non, on ne peut  » faire avec » un violeur d’enfant. Juger et accabler une victime c’est accepter les agressions, c’est choisir l’agresseur. Ne pas prendre parti , être neutre, aussi.

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